Le devoir de conseil du maître d’œuvre à nouveau étendu par le Conseil d’Etat

Le Conseil d’Etat étend une nouvelle fois le champ du devoir de conseil du maître d’œuvre en estimant que ce dernier est tenu, lors des OPR, d’appeler l’attention du maître d’ouvrage, non seulement sur les désordres apparents, mais également des non-conformités apparentes aux stipulation contractuelles ou des manquements apparents aux règles de l’art et aux normes applicables, quand bien même ces circonstances n’entraineraient aucun désordre.

L’arrêt attaqué (CAA Lyon, 2 février 2023, n° 20LY2143), qui développait un raisonnement nuancé en considérant que les non-conformités en cause n’étaient pas des non-conformités à des règles découlant du contrat (mais plutôt des non-conformités à des normes génériques et aux « règles de l’art »), et qu’elles ne faisaient donc pas partie du devoir de conseil du maître d’œuvre, est annulé.

Il en résulte donc que le maître d’œuvre est tenu d’appeler l’attention du maître d’ouvrage, avant réception, sur toutes les non-conformités, que celles-ci soient d’origine contractuelle ou qu’elles résultent de règles plus évanescentes telles que les normes non expressément visées au marché ou les « règles de l’art ».

Ce faisant, le Conseil d’Etat poursuit l’extension du champ du devoir de conseil dont il avait déjà récemment considéré que celui-ci s’étendait aux changements intervenus dans la règlementation entre le dépôt du permis de construire et la réception, étant précisé que les seules règles applicables à l’ouvrage en tant que tel sont celles applicables au moment du dépôt du permis de construire et que l’extension du devoir de conseil n’est donc pas calquée sur les obligations du maître d’ouvrage mais bien sur son éventuelle volonté d’excéder les exigences règlementaires (CE, 10 décembre 2020, n° 432783, Cne de Biache-Saint-Vaast).

Il est légitime de s’interroger sur l’opportunité d’une telle extension – qui semble à ce stade sans limites – du devoir de conseil du maître d’œuvre et sur les moyens pratiques dont disposent réellement les maîtres d’œuvre pour satisfaire à ces nouvelles obligations.

CE, 22 décembre 2023, n° 472699, OPH DOMANYS

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